"Rêve de sphinge"
(Par-avant 42, Encres délibérées)
Sous les nappes obscures qui remuent frénétiquement, dans le soutènement des choses, le souffle prend corps. Au creux le plus intime, dans la paroisse interne aux reflets nacrés que personne ne peut voir, là où des chœurs étranges se mettent parfois à sourdre dans des murmures ténus de froissement de feuille, qui grossissent bientôt et emplissent la cavité d’une force redoutable, tout se joue en un seul mouvement – non prémédité. Mais on ne le sait pas.
Le souffle prend corps.
Il s’insinue, remonte jusqu’au surfaces claires qui nous sont accessibles, familières. On ne sait rien de sa force qu’il canalise à l’approche des cils frémissants.
D’un claquement de doigt, il disparaît dans une spirale insaisissable. Tout est enfoui en nous d’une autre main qu’on fait sienne. Elle crispe parfois le poing, par inadvertance ou colère et tout est coupé net, retourne dans un trou qui effraie, comme une bouche sans dents qui hurle sombrement.
Il reste là, aveugle et impuissant, perdu. Et puis il respire l’encre et ça le rassure.
« C’est entre les bras de l’autre que le corps prend volume, murmure la sphinge. C’est depuis l’encre déliée que le mot prend vie. »